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lundi 15 mai 2017

Villefranche de Rouergue 1943, Mutinerie du SS-Gebirgs-Pioner-Bataillon 13


 

Pour le début de l'année 2017 HistoReich prend la direction l'Aveyron et la ville de Villefranche de Rouergue, une ville que j'aime bien et où j'effectue un retour sur le terrain bien ensoleillé sur les traces de la mutinerie d'une partie du SS-Gebirgs-Pionier-Bataillon 13 (SS-Geb.Pi.Btl.13) de la Kroatische SS-Freiwilligen-Gebirgs-Division. Cette unité était composée de Croates venant des régions de Croatie et de Bosnie, cette division balkanique ne porte pas encore le nom de "Handschar", elle ne le portera qu'à partir du 15 mai 1944. Je rappelle que l'objet de cet article n'est pas de décrypter la mutinerie -il y a des livres pour ça- mais de nous rendre sur les lieux. 

Comme nous ne sommes pas loin du Tarn et Garonne je vous invite à suivre les traces de la 2.SS Panzer-Division "Das Reich" et plus particulièrement le SS-Panzer-Regiment 2 du SS-Obersturmbannführer Tychsen dans le secteur de Caussade. Un retour sur le terrain étalé sur une cinquantaine de kilomètres surtout que la région est particulièrement jolie.

La Handschar

Visite du Grand Mufti de Jerusalem à la division. Une photo très intéressante puisque aux cotés du moustachu on y voit l'imam Halim Malkoc en uniforme

La mutinerie de la nuit du 16-17 septembre 1943

Il existe deux cas de mutinerie de Waffen SS en France, celle du III.Bataillon./Infanterie Regiment I de la 30.Waffen Grenadier Division der SS en août 1944 et celle qui nous concerne, la mutinerie de certains éléments du SS-Gebirgs-Pionier-Bataillon 13 qui trouve son origine dans plusieurs causes.


La première cause

C'est le 10 février 1943 qu'est accordé par Adolf Hitler la création d'une division SS d'origine balkanique. Le 1er mars 1943 à Zagreb est activé le recrutement de la Kroatische SS-Freiwilligen-Division aux ordres du SS-Standartenführer Herbert von Oberwurzer, la division est subordonnée au SS FHA.
Ante Pavelic le chef de l'état croate commence à pratiquer une politique d'obstruction systématique. Il reproche aux allemands de lui prendre les recrues dont il a besoin pour sa propre armée.
Malgré la venue de volontaires, dont 1000 jeunes musulmans influencés par le grand Muphti de Jerusalem Haj Amin El Husseini, la campagne de recrutement stagne. C'est alors que les allemands ont recours quelques mois plus tard à la conscription, rétablie par le gouvernement croate, mais aussi à des recrutements forcés. Quelques musulmans sont ainsi versés dans la formation allemande au détriment de l'armée régulière croate.
Nous avons donc des volontaires de plein gré, des croates nationalistes issus de la milice Ustacha qui préféraient l'armée régulière d'Ante Pavelic et des musulmans qui ne voulaient, eux, ni de l'un ni de l'autre. Ces deux communautés se livraient déjà à d'affreuses exactions envers les Serbes.
 
Voici ce qu'en dit Georges Bernage :
 
" Plus qu'une guerrilla entre Allemands et Yougoslaves, le conflit qui régnera dans ce pays de 1941 à 1945 sera avant tout une guerre civile où Croates, Serbes et Bosniaques se massacreront avec beaucoup de cruauté et de haine".

La deuxième cause

En raison de l'hostilité locale, des risques de désertion, et de l'insécurité due aux partisans communistes, la division est envoyée en formation en France fin juillet 1943.
Quelques nationalistes Croates, fidèles de Ante Pavelic prennent cela pour une trahison de leur engagement puisqu'ils voulaient rester sur le territoire national. Ils vont se révolter et s'associer à quelques musulmans mécontents de leur sort puisqu'ils aussi sont l'objet de friction avec des recrues catholiques, d'ailleurs les catholiques, les orthodoxes, les musulmans nourrissent déjà les tensions dans les Balkans. Quelques communistes se joignent aussi à la mutinerie.

La troisième cause

Pour d'autres c'est la volonté de déserter purement et simplement. Considérant finalement que la vie militaire -et guerrière- n'était pas faite pour eux.

Le 2 juillet 1943, l'Etat Major de la division est basé au Puy en Velay, la formation change d'appellation pour devenir Kroatische SS Freiwilligen-Gebirgs-Division subordonnée au SS Korps 5 (Gebirgs). Comme nous pouvons le voir la formation est devenue une unité de montagne, guère étonnant lorsqu'on connait le relief des régions balkaniques.
Le 14 septembre 1943, l'Etat Major est dorénavant à Mende.    

La mutinerie éclate dans la nuit du 16-17 septembre 1943, le lendemain matin elle est écrasée par d'autres unités Waffen SS Croates venant de Rodez, de Mende mais aussi par celles qui étaient en garnison à Villefranche de Rouergue. La mutinerie, sanglante, a donc été commise par une minorité et ne représentait pas de ce fait le bataillon, ni la division dans son intégralité.  


Les chefs rebelles

Mutinerie de villefranche de rouergue 1943
De gauche à droite : Dzanic, Matutinovic, Vukelic

Les chefs rebelles n'ont pas pas suivis les cours d'officiers ni de sous-officiers dans les SS-Junkerschule ni à la SS-Pionier Schule de Hradischko en Bohème-Moravie. Ils tirent leurs grades de leurs anciennes affectations dans l'armée croate. Ce qui n'est pas comparable, par exemple, aux gradés de la  8.Franz.Freiwilligen-Sturmbrigade qui ont suivi le parcours "normal" des volontaires Waffen SS incorporés en 1943.
Dès le départ, des concessions ont donc été faite à ces Waffen SS qui ne bénéficient donc pas d'une instruction militaire, morale et politique de premier ordre. 

SS-Untersturmführer Farid Dzanic.
Né le 7 septembre 1918 à Bihac en Bosnie, il est musulman et communiste. Déserteur de l'armée croate où il servait dans la protection des chemins de fer, il rejoint les partisans de Tito en 1942. Prisonnier par les allemands en juin 1943, il est envoyé dans un camp de prisonnier à Sarajevo puis s'engage dans la division SS dans le but de l'infiltrer. Il est Zugführer à la 1. Kompanie.
Il est le principal instigateur de la mutinerie.
 
SS-Hauptscharführer Eduard Matutinovic.
Né en 1923 dans un village en Croatie. Catholique et voleur, durant la mutinerie il en profite pour déserter avec la caisse du bataillon. Il est zugführer à la 5./Regiment 1. Décède en 1945 à Vukovar.
 
SS-Oberjunker Nikola Vukelic.
Né le 18 mars 1924 à Gospic en Croatie. Catholique, il s'engage dans la division puis est envoyé à Dresden suivre des cours à l'école de formation du génie la SS-Pionier-Kaserne. Il en sort SS-Oberjunker et devient Kompaniechef à la 20./Regiment 1.
 
SS-Oberscharführer Lutfija Dizdarevic.
Né en 1921 né à Sarajevo est Croate musulman.

L'arrivée du Bataillon

Le 6 août 1943, une partie du matériel du bataillon arrive en la gare de Villefranche de Rouergue. Lorsque la mutinerie éclatera et en prévoyance d'une arrivée possible de renforts contre-insurrectionnels venant de Rodez, la gare est sous la surveillance armée des mutins.
Alors que la mutinerie échoue, les rebelles battent en retraite vers le quartier de la gare et tentent de rejoindre la campagne.

gare de villefranche de rouergue
Sur cette carte postale nous pouvons voir la gare qui n'a d'ailleurs pas changé depuis et c'est tant mieux
  

mutinerie de villefranche de rouergue
La gare heureusement encore en service de nos jours

mutinerie de villefranche de rouergue
Vue sur les quais, aucun train n'arrivera de Rodez la nuit de la mutinerie 

Les casernements

Le SS-Geb.Pi.Btl.13 loge dans différentes écoles de la ville. Le terrain vallonné et la présence de l'Aveyron se prêtent assez bien à l'instruction d'une unité du génie mais la ville n'offre pas les baraquements d'un camp militaire comme Caylus situé à une trentaine de kilomètres seulement.
Le collège municipal, cantonnement de la 1. Kompanie a été détruit après la guerre.   


Institution Saint Joseph

Infirmerie du bataillon 

Mutinerie de villefranche de rouergue 1943
Institution Saint Joseph de Villefranche accueillait l'infirmerie du bataillon SS

Mutinerie de villefranche de rouergue 1943
Institution Saint Joseph de Villefranche de Rouergue accueillait l'infirmerie du bataillon SS


Ecole primaire Jean Pendaries

Y est établie la 2./SS-Geb.Pi.Btl.13

Mutinerie de villefranche de rouergue 1943
vieille carte postale de l'école Jean Pendaries

mutinerie de villefranche de rouergue
L'école Pendaries de Villefranche de Rouergue, ancien cantonnement de la 2.Kompanie


Ecole Notre Dame

mutinerie de villefranche de rouergue


Hotel Moderne/Banque Populaire
 
Le 28 août 1943, plusieurs chambres de l'hôtel moderne sont réquisitionnées par l'encadrement allemand, 6 officiers dont notamment le chef de bataillon le SS-Hauptsturmführer Heinrich Kuntz et le SS-Obersturmbannführer Oskar Kirchbaum, commandant de la place de Villefranche de Rouergue.
Le 17 septembre à minuit, la mutinerie éclate. Une dizaine de rebelles fait irruption dans l'hôtel Moderne et kidnappe les officiers allemands pour les emmener à l'école primaire supérieure des jeunes filles, le PC du bataillon où ils seront exécutés.

mutinerie de Villefranche de rouergue
L'Hôtel Moderne avant la guerre

mutinerie de villefranche de rouergue
L'hôtel moderne est la banque Populaire à devanture bleue sur notre droite


Ecole primaire supérieure des jeunes filles

 
L'école est le poste de commandement du bataillon et la Kommandantur, c'est ici que les officiers capturés par les mutins sont assassinés.
Seul Alexander Michawetz, Kompaniechef de la 1. Kompanie, blessé par balle arrive à s'échapper et trouve refuge sur les hauteurs de la ville

SS-Obersturmführer Michawetz
Mutinerie de villefranche de rouergue 1943
le PC du bataillon où ont été exécutés les officiers allemands est aujourd'hui détruit

Parc mémorial des croates

 
Le parc mémorial des croates a fait l'objet d'un article sur HistoReich 
 
Mutinerie de villefranche de rouergue 1943
Parc mémorial des Croates avant son réaménagement

Bilan

 
On l'a vu, la motivation principale des mutins n'étaient pas de libérer Villefranche de Rouergue des Allemands, encore moins la France. La crise existait dès la création de la division, en Croatie.
La mutinerie fut un échec total, elle ne dura que quelques heures et à aucun moment Villefranche de Rouergue ne fut libérée puisque les éléments même du SS-Gebirgs-Pionier-Bataillon 13 écrasèrent la rebellion. Toutes les troupes, toute la ville n'étaient pas sous contrôle. Les mutins ont fait courir d'ailleurs un très grand risque à la population locale qui se terrait dans leurs maisons avec l'interdiction de sortir sous peine d'exécution, la loi martiale y était décrétée. 
Il faut noter, contrairement à l'article de Georges Bernage parue dans un 39-45 Magazine, l'inaction totale de la résistance locale qu'elle soit FTP et FFI.  Lorsque les rebelles prennent position à la gare de Villefranche, le but était de riposter en cas d'arrivée de renforts venant de Rodez, elle viendra finalement par la route, or si la résistance était active celle-ci aurait saboté purement et simplement les rails à l'heure H, ce qui était bien mieux qu'un affrontement aux abords d'une gare. Pire, les renforts venant par la route sont arrivés sans encombre, sans aucun guet-apens. La résistance française était donc inexistante dans cette affaire. Comme bien souvent après la guerre, les communistes tenteront de récupérer la mutinerie à leur compte. 

Les victimes inhumés à Rodez  

20 septembre 1943, Rodez. Convoi funéraire des victimes germaniques

Les corps des officiers germaniques exécutés ont été inhumés dans l'après-midi du 20 septembre 1943 à Rodez.
Après la guerre ils sont transférés au Deutscher Soldatenfriedhof de Dagneux dans l'Ain. Désolé je ne m'y suis pas encore rendu. il faut savoir que des français de la 8./Rgt 3 de la Division Brandebourg y sont aussi inhumés.

SS-Obersturmbannführer Oskar Kirchbaum

SS-Standartenführer Oskar Kirchbaum né le 26 août 1895 à Warazdin en Croatie
repose au bloc 6 rangée 18 tombe 619.
Notons que Oskar Kirchbaum a été élevé au rang de SS-Standartenführer à titre posthume, chose courante dans l'armée allemande, qui sert souvent à améliorer la rente pour la veuve.


SS-Obersturmführer Gerhard Kretschmer
 
SS-Obersturmführer Gerhard Kretschmer né le 21 avril 1904 à Görlitz. (Ici avec le grade de SS-Unterscharführer)
repose au bloc 6 rangée 17 tombe 607

SS-Obersturmführer Julius Galantha
 
SS-Obersturmführer Julius Galantha né le 2 décembre 1905
repose au bloc 6 rangée 17 tombe 605

SS-Hauptsturmführer Heinrich Kuntz
 
SS-Hauptsturmführer Heinrich Kuntz né le 8 août 1905 à Alt-Werbas
Un ancien de la SS-Freiwillige Division "Pinz Eugen"
repose au bloc 6 rangée 18 tombe 617
 
SS-Obersturmführer Anton Wolf né le 6 janvier 1894 à Sremski-Karlovci en Serbie
repose au bloc 6 rangée 17 tombe 603
   

Les mutins

Les bandits sont traqués dans les rues de Villefranche de Rouergue. la scène se passe après la nuit tragique puisque les armes sont baissées, le groupe n'est plus en formation de combat.
 
15-20 mutins auraient été tués par leurs ex-camarades, certains abattus dans la ville les armes à la main. D'autres, dont le SS-Mann Nikola Vukelic dégradé pour l'occasion, sont exécutés devant un peloton. Encore une fois je renvoie le lecteur à l'article sur le parc mémorial des Croates.
Comme le décrit Nicolas Camatta, certains éléments seront dégagés de la Waffen SS et se retrouveront comme travailleurs ou bien pour les plus réfractaires, en camp de concentration. Une chose courante puisque certains français de la LVF réfractaires au passage à la Waffen SS en 1944 subiront le même sort. 
Pour la population de Villefranche de Rouergue et c'est finalement le plus important, aucune victime civile ne fut déplorée, les quelques civils interpellés ont été rapidement relâchés, sans aucune poursuite pénale.

Après la mutinerie

 
Le 1er octobre 1943, l'imam militaire Halim Malkoc est promu SS-Hauptsturmführer et reçoit la croix de Fer de seconde classe. Le même mois, la Kroatische SS-Freiwilligen-Gebirgs-Division et donc le SS-Geb.Pi.Btl.13 quittent la France pour la Silésie et la Yougoslavie en février 1944. La division se bat contre les partisans mais elle se distingue surtout par ses atrocités d'une autre époque. Dès octobre 1944, les Allemands décident finalement de démobiliser les combattants d'origine Bosniaques et musulmans, jugés peu disciplinés et fiables.
 
Waffen SS de la 13. Waffen-Gebirgs-Division der SS "Handschar"
1944. Waffen SS de la 13. Waffen-Gebirgs-Division der SS "Handschar"
 
A la fin de la guerre, le reste de la division est en Autriche et n'est plus réduite qu'à une Kampfgruppe "Handschar". Les derniers "combattants" se rendent aux Britanniques le 7 mai 1945. Laissons le dernier mot à l'historien et éditeur Georges Bernage :
 
"La politique menée par Himmler aura conduit à la mise sur pied de trois divisions musulmanes dans les Balkans (il y eu aussi la division albanaise Skanderberg). Mais ce seront les trois plus mauvaises divisions de la Waffen SS et qui laisseront derrières elles un sillage sanglant."
 

Le sort du SS-Hauptsturmführer Halim Malkoc

 
SS-Hauptsturmführer Halim Malkoc

Après la guerre, l'imam Malkoc sera condamné à 11 ans de travaux forcés par le tribunal militaire de Sarajevo puis condamné à mort "au nom du peuple" pour la répression de la mutinerie. Naturellement durant le procès il n'avait pas d'avocat ainsi le jugement était connu d'avance. Il est exécuté le 8 février 1947. Resté fidèle aux Allemands jusqu'à sa mort, son corps n'a jamais été retrouvé.
 

La mutinerie des Ukrainiens


Enfin pour terminer sur ce sujet car cela aurait pu être le cas des mutins de Villefranche de Rouergue. En août 1944 le II.Bataillon du 1.IR de la 30.Waffen Grenadier der SS  composé d'Ukrainiens se mutinait à son tour dans l'est de la France. Après avoir massacré plus de 200 Allemands de l'encadrement, ils réussirent à rejoindre les rangs de la Légion Etrangère française pour combattre l'Allemagne, de manière peu vigoureuse il est vrai. Après la capitulation allemande et suivant les accords passés entre les alliés, la France les livra aux mains des Soviétiques, qui s'empressèrent de les exécuter. D'autres plus chanceux et qui étaient alors en permission en France, arriveront à se faire oublier parmi la population.
 
Monument aux morts de la guerre 1870 de Villefranche de Rouergue
Monument aux morts de la guerre 1870 de Villefranche de Rouergue
 
Puisque nous sommes à Villefranche de Rouergue profitez en pour voir le monument aux morts de la guerre de 1870. Il est près de la mairie et est particulièrement réussi, les bronzes sont d'une belle qualité.
 
Enfin  comme nous ne sommes pas loin du Tarn et Garonne je vous invite à suivre les traces de la 2.SS Panzer-Division "Das Reich" et plus particulièrement le SS-Panzer-Regiment 2 du SS-Obersturmbannführer Tychsen dans le secteur de Caussade. Un retour sur le terrain étalé sur une cinquantaine de kilomètres surtout que la région est particulièrement jolie.  
 

Nous Lirons

 
Pour comprendre la situation en Yougoslavie durant la seconde guerre mondiale nous lirons :
39-45 Magazine n°76 "Yougoslavie 1941-1945" mais nous éviterons 39-45 Magazine n°135 sept 97 dont l'article daté et s'appuyant sur les écrits idéologiques et non pas historiques d'un militant communiste comporte malheureusement de nombreuses erreurs.


"17 septembre 1943 mutinerie à Villefranche de Rouergue" de Nicolas Camatta. Auto-édité
L'auteur a quelques lacunes dans l'Armée allemande et ça se lit à la lecture de l'ouvrage, par exemple le "Nachrichten.Abteilung" qui est signalé comme "bataillon de signal" (sic), le Feldpostnummer non remarqué. Il faut dire que Nicolas Camatta s'est appuyé sur le livre de George Lepre ce qui explique beaucoup de choses sur ce point. Certes le livre a des défauts mais il a aussi ses qualités notamment de remettre les pendules à l'heure sur les mythologies d'après-guerre. Un indispensable et le seul. 

samedi 25 mars 2017

Mutinerie du SS-Gebirgs-Pionier-Bataillon 13 à Villefranche de Rouergue 1943


Aujourd'hui, je suis en Aveyron à Villefranche de Rouergue. Le paysage dans cette région est franchement magnifique, vallonnée avec une météo bien chaude l'été et avec un population à l'accent typique mais agréable, du moins quand on le comprend. Dans cet article, je vais faire un retour sur le terrain concernant la mutinerie ratée d'une partie du SS-Pionier-Bataillon 13 de la Kroatische SS-Freiwilligen-Gebirgs-Division et je commence par la fin de l'histoire en me rendant au monument aux fusillés, appelé "Parc mémorial des Croates" jadis "le champ des martyrs". 

Qui était les fusillés ?

Il s'agit de Croates originaires de Croatie et de Bosnie, nationalistes catholiques, musulmans,  communistes qui s'étaient engagés dans les rangs de la Waffen SS au sein du SS-Gebirgs-Pionier-Bataillon 13 de la Kroatische SS-Freiwilligen-Gebirgs-Division, des sapeurs du génie d'une division de montagne de la Waffen SS.

Volontaires Croates de la 13ème Division SS Handschar

Indisciplinés militairement, politisés à l'extrême et même infiltrés par des éléments communistes, quelques éléments du bataillon, 150 au maximum face aux 500 voir 1000 hommes qui composent ce bataillon se soulèvent en exécutant une partie de l'encadrement germanique mais aussi en faisant le coup de feu contre leurs propres compatriotes qui n'ont pas suivi la révolte.
La mutinerie est rapidement écrasée par les hommes du bataillon qui n'ont pas suivi les "bandits" pour reprendre le vocabulaire de l'époque. Certains mutins sont exécutés à Villefranche de Rouergue le jour même.

Croates ou bosniaques ?

En 1943, la Croatie et la Bosnie-Herzégovine était une même et seule nation l'Etat indépendant de Croatie dirigé par le très nationaliste Croate Ante Pavelic. La région de Croatie était catholique et la région de Bosnie était musulmane. Ils étaient donc tous d'une même nationalité : Croate.

Le parc des Croates de plus en plus entouré de maisons

Le parc situé sur la route de Rodez avait été réquisitionné par les Waffen-SS pour y mettre les chevaux du bataillon. Après l'échec de la mutinerie le 18 septembre 1943, 14 rebelles sont emmenés dans ce champ pour y être fusillés un à un comme c'est la règle dans l'armée allemande. Un SS-Rottenführer est présent pour donner le coup de grâce avec son pistolet.

Il y a parmi eux 8 SS-Pionier, 1 SS-Sturmmann, 2 Rottenführer, 2 SS-Unterscharführer et 1 SS-Oberjunker. Les gradés perdent naturellement leur galons.
 
1948. Vue aérienne du champ où sont enterrés les mutins du SS-Bataillon.  Une stèle y est déjà installée.

La fosse à peine recouverte de terre, les chiens ne tardent pas à déterrer les cadavres sans parler de l' odeur épouvantable de corps en décomposition qui émane du champ, ils manquaient un peu de chaux.
Le 15 octobre 1943, un détachement de soldats allemands vient recouvrir les cadavres de 600 kg de chaux.
Près d'un an plus tard, le 5 octobre 1944, une demande d'exhumation des corps est demandé par le maire de Villefranche de Rouergue au préfet de l'Aveyron. Une demande acceptée le 11 octobre 1944 mais l'exhumation prend du retard à cause d'une météo capricieuse.
Le 11 octobre 1945, un an après la demande, le ministère des anciens combattants décide finalement de maintenir les corps en place.
Le 8 octobre 1950, un monument est érigé par le gouvernement communiste yougoslave. Ce qui a un côté ironique puisqu'il s'agit tout de même de Waffen SS et certains rebelles étaient très loin d'être communistes.
Le 17 septembre 2006, un nouveau mémorial, l'actuel, est inauguré. Le statues sont offertes par le gouvernement croates et le reste est financé par les français (Etat, région, commune).

Parc mémorial des Croates en 1997

Le monument est totalement différent de l'actuel. Il a été érigé par le gouvernement communiste yougoslave, le terrain appartenait d'ailleurs à la Yougoslavie depuis 1951 mais depuis la scission du pays, aucun pays ne le revendique et l'entretien revient à la ville.

Depuis 1950, la stèle apposée après la guerre a bien évolué
 
mutinerie du SS bataillon Handschar de villefranche de Rouergue
1997. Le monument érigé par les communistes yougoslaves, l'étoile rouge fait sourire lorsque l'on sait que dessous il y a des oustachis.
 
Sur la plaque commémorative où figurait une étoile rouge était inscrit :

"Ici reposent, les combattants yougoslaves qui tombèrent loin de leur patrie sous les balles de l'ennemi nazi à la suite de l'insurrection de Villefranche de Rgue du 17 septembre 1943"
"Les balles de l'ennemi nazi" étaient tout de même celles de Waffen SS croates qui n'avaient pas adhéré à la mutinerie. Les mutins ont été exécutés par leurs propres compatriotes. Il est aussi surprenant de voir l'étoile rouge, honorée des militants oustachis fortement anti-communistes et souvent antisémites. 
Cette plaque est conservée au musée municipal.

mutinerie du SS bataillon Handschar de villefranche de Rouergue
le mur où s'appuyait l'ancien monument est toujours en place
 

Parc mémorial des Croates en 2017


PARC MEMORIAL DES CROATES
Le mémorial pas spécialement bien indiqué est situé sur l'ancienne route de Rodez
PARC MEMORIAL DES CROATES
l'entrée du parc mémorial, les drapeaux retirés, brille par sa sobriété. il est facile de passer à côté sans le remarquer   
PARC MEMORIAL DES CROATES
PARC MEMORIAL DES CROATES
La place des révoltés avec ses statues représentant des hommes tombant sous les balles. On note l'influence de Rodin dans les sculptures de Vanja Radaus
PARC MEMORIAL DES CROATES
Peut être le seul mémorial élevé en France en mémoire de Waffen SS
PARC MEMORIAL DES CROATES
Le mère patrie est symbolisée par cette statue, réalisée en 1952 la statue a été donnée par la ville de Pula en 2006
PARC MEMORIAL DES CROATES
PARC MEMORIAL DES CROATES

La plaque


Aux martyrs
combattants pour la liberté
qui s'insurgèrent contre le nazisme
le 17 septembre 1943
à Villefranche de Rouergue
reposant ici et en des lieux inconnus
Leurs compatriotes
de Croatie et de Bosnie Herzégovine
les Villefranchoises et les Villefranchois
fidèlement reconnaissants

Nous lirons


"17 Septembre 1943, mutinerie à Villefranche de Rouergue" de Nicolas Camatta.
Même si l'auteur, Nicolas Camatta ne maitrise pas les rouages de l'armée allemande il s'agit à mon avis du meilleur livre sur le sujet. Pas facilement trouvable car auto-édité, l'auteur balaie d'un revers de sa plume les vieux textes et articles erronés (à des fins militantes) que l'on trouvait dans les magazines mais aussi sur le net.

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