Il y a quelques temps déjà j'avais profité d'un voyage professionnel aux Pays-Bas pour me rendre devant, non pas un énième Panther Ausf A ni même un Ausf G mais un rare Panther Ausf D. C'était la première et dernière fois que je voyais ce modèle bien spécifique car c'est un char que nombre de musées aimeraient bien avoir en exposition mais si le Panther Ausf D est bien exposé, c'est plutôt aux intempéries...
Le Panther Ausf D
La création du char moyen Panther découle de la découverte surprise par les Allemands du char russe T-34 lors de l'Opération Barbarossa. De par sa conception, sa puissance, le T-34 surclassait les Panzer III ainsi que la majorité des canons antichars allemands, sauf pour le toujours très efficace canon de 88 mm.
Pour le Waffen Amt, il fallait une réponse adaptée et surtout encore plus efficace et la réponse sera à la hauteur. En novembre 1941, Daimler Benz et M.A.N sont chargés du projet d'un char de 30 tonnes dénommé VK30.02. Si le prototype Daimler Benz s'inspire largement du T-34 soviétique, la version M.A.N est dans la continuité des modèles allemands hormis pour son glacis avant incliné...repris du T-34. Ce qui ne sera pas du tout le cas du Panzer VI "Tiger" Ausf E.
Si le prototype Daimler Benz semble avoir un temps la préférence, la décision finale penchera vers le M.A.N. La pré-production est ordonnée le 15 mai 1942 et les premiers modèles sont encours d'assemblage en novembre de la même année. En janvier 1943, le char prend le nom de Panther Ausf D et trois exemplaires sont envoyés en test à Grafenwhör. Il en ressort que le char manque sincèrement de fiabilité et il nécessite plusieurs dizaines de modifications urgentes mais la production est lancée et elle est confiée aux usines Daimler Benz, M.A.N, M.N.H et Henschel, les modifications urgentes sont confiées à l'usine DEMAG.
En mai 1943, 250 exemplaires sont déjà sortis d'usine et les Panther reçoivent le moteur Maybach HL230 P en lieu et place du HL210 P30 mais pour le char les déboires de conception continuent. Malgré tout, les Panther vont subir l'épreuve du feu dès le 5 juillet 1943 avec le déclenchement de l'Opération Zitadelle dans le saillant de Koursk. Trois jours après le début de l'offensive, il ne reste plus que 40 chars opérationnels sur les 184 du début de l'attaque. Les mines et les canons antichars soviétiques ont fait des dégâts mais aussi le manque de fiabilité (moteur et transmission) est mis en cause, 46 Panther sont en réparation lorsqu'ils n'ont tout simplement pas pris feu.
En dehors de ces problèmes, graves tout de même, son canon de 75 se montre redoutable d'efficacité, de nombreux T-34 sont détruits à plus de 1500 mètres. A l'issue de la bataille, des enseignements sont tirées, des problèmes corrigées même si certains comme la fiabilité mécanique persisteront, et c'est grâce à Koursk que le Panther se verra revêtir par la suite de la fameuse pâte Zimmerit.
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Un Panther Ausf D saute sur ses freins, la caisse bascule vers l'avant. A l'intérieur c'est du brutal
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Le Panther est motorisé par un Maybach HL210 P30 secondé par une boite de vitesses à 7 rapports. Avec ses 720 litres d'essence embarqués, son autonomie est de 250 kilomètres sur route et 100 kilomètres en tout-terrain, en théorie car tout cela dépend de l'état du terrain, avec la boue ukrainienne la consommation devait explosé, comme l'embrayage d'ailleurs.
Au niveau de la masse, le cahier des charges est largement dépassé puisque le char pèse maintenant 44,8 tonnes.
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Un Panther Ausf D saute sur ses freins, la caisse bascule vers l'avant. A l'intérieur c'est du brutal
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Ausf D est la première version du char allemand, il diffère du
Panther Ausf A sur plusieurs points, voici quelques astuces visuelles pour l'identifier.
- La coupole du Panzer-Kommandant et un modèle comparable à celle montée sur les premiers modèles de
Tiger Ausf E.
- Sur les premiers modèles il y a deux trappes sur le côté droit de la tourelle
- L'absence de Kugelblende, cette petite bosse sur le glacis avant d'où sort le canon de la MG 34, mais attention sur les premiers modèles de Ausf A il était aussi absent.
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Panther Ausf D en marche vers les combats
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Un Panther venu d'Allemagne
Le 29 octobre 1944, la 1ère Division Blindée polonaise du général Maczek entre dans Breda. En 1945, alors stationnés sur le terrain d'essais de la firme Krupp à Meppen en Allemagne, les Polonais saisissent un Panther Ausf D qu'ils offrent à la municipalité de Breda le 29 octobre 1945, lors de la commémoration de la libération de la ville. La caisse du char est numérotée 210 198 ce qui veut dire que c'est le 198 sorti de la chaine et fabriqué en juillet 1943 à Nuremberg par la firme MAN. En ce mois de juillet 1943, 58 Panther ont été produits. MAN s'est chargé de la fabrication des 210 001 à 211 001.
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Le Panther Ausf D de Breda avant sa restauration, il subsistait encore quelques accessoires comme l'éclairage Bosch Tarnlampe
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Pendant quelques années, le blindé a un peu voyagé à travers la ville, la municipalité ne sachant pas vraiment où l'exposer, le Panther était en quelques sorte une "patate chaude". C'est en 1952 qu'il trouve enfin sa place au Wilhelminapark.
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Panther Ausf D à un croisement de rue à Breda
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Au fil des ans, quelques collectionneurs ou plutôt voleurs dépouillent le Panther de ses accessoires puis en 2003, il est décidé de le restaurer pour le préserver des intempéries. L'affaire est confiée au collectionneur britannique Kevin Weatcroft qui récupère au passage la transmission et le mécanisme de tourelle pour son propre Panther en cours de restauration.
Le Panther est vidé de son intérieur, un gel spécial de protection est appliqué sur toute la caisse et le blindé retrouve son emplacement le 29 octobre 2004. Il faut bien le dire la restauration est minimaliste et ...minable.
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Pas moins de 3 plaques commémoratives sur le devant du blindé c'est exagéré
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Il ne faut pas se voiler la face le Panther est réduit à sa plus simple expression, une forme.
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Le Panther présente un sérieux problème de tension de chenille, le barbotin arrière est curieusement affaissé
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La tourelle
C'est une version avec le premier type de coupole (Pz-Führerkuppel) trop haute et peu pratique avec ses angles morts.
Comme les premiers Tiger, les Panther étaient initialement équipés de pots fumigènes (Nebelwurfgeraet) mais la pose semble abandonnée dès juin 1943.
Sur cette tourelle, vous pouvez remarquer la trappe pistolet et de communication. La trappe de communication, qui servait comme son nom l'indique à faciliter la communication entre le chef de char et l'infanterie d'accompagnement ou les estafettes, est supprimée dès juillet 1943 mais notre Panther en possède encore un. Vous remarquez que les deux trappes sont équipées d'une petite gouttière pour éviter que l'eau ne pénètre dans la tourelle.
Sur cette tourelle était inscrit 534 en chiffre noir surligné de blanc, remplacé maintenant par un simple 534 noir. Ce blindé était donc à la 5. Kompanie, 3.Zug où il était le 4e.
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Vers la fin de sa production le Panther Ausf D verra sa tourelle et coupole modifiée, ce qui n'est pas le cas sur celui de Breda, ce qui le rend encore plus rare.
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Sur le Panther Ausf A, ici celui du musée des blindés de Saumur, les trappes latérales ont disparu laissant place aux chenilles. La coupole est totalement modifiée. Le manteau du canon est modifié même si à l'oeil ce n'est pas évident de remarquer les différences.
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Vue arrière de la tourelle, qu'on se rassure les meurtrières de la coupole ont été bouchées après la guerre. La petite trappe à gauche possédait une petite gouttière plutôt efficace lorsque l'on voit les trainées sur le métal. Le garde-main de la trappe du chargeur a disparu, difficile de l'ouvrir maintenant.
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La coupole de ce Ausf A est bien différente de celui de Breda. La petite trappe à gauche a disparu
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La zimmerit
La Zimmerit était initialement appliquée mais elle a pratiquement disparu, mais comme il est de coutume, vous pouvez toutefois en voir les couches d'origine sur la caisse derrière les chenilles.
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Sur cette face nous voyons le revêtement zimmerit appliqué sur la caisse. Les Schürzen, petites plaques de blindages montés le long de la caisse apparues en avril 1943 sont absentes
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Sur l'autre face, là encore le zimmerit d'origine est encore présent
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Le glacis avant
C'est ce qui permet d'ailleurs de différencier au premier coup d'oeil ce Ausf D d'un Ausf A, même si sur les premiers modèles de Ausf A la différence est plus difficile. Sur ce modèle il n'y a pas de Kugelblende mais un MG-Klappe nettement moins pratique. Le fahrersehklappe est lui aussi présent comme sur un Ausf A, cette trappe était difficile à refermer lorsque la terre s'y accumulait.
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Vue sur le glacis du Panther Ausf D, la trappe de vision du Panzer-Fahrer est en position fermée
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Panther Ausf A 256 du musée des blindés de Saumur. Sur cette vue, si nous faisons abstraction de la Zimmerit appliquée sur le blindé, nous voyons le Kugelblende avec sa rotule pour MG 34 ainsi que la trappe de vision du conducteur ouverte. Les premières versions de A n'avaient pas de Kugelblende.
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L'arrière
L'arrière se montre bien trop dépouillé même si il reste encore les capots pivotants des
Kettenspanner (tension de chenilles) qui manque au
Tiger de Vimoutiers par exemple. Le
Kurbelwellenbenzinanlasser (le gros cercle au milieu), servant au démarrage du blindé par manivelle, n'a pas (encore) été dérobé.
Naturellement les Gepäckkasten, les coffres traditionnellement fixés aux extrémités de la caisse ne sont plus là et c'est bien dommage car cela participe à la ligne du Panther.
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L'arrière d'un Panther Ausf D, comparez le à celui de Breda |
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Quelle tristesse...
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Vue sur le compartiment moteur, combien de soldats et de touristes sont montés sur cette plateforme ?
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Voir aussi à Breda
Comme je sais que certains lecteurs d'HistoReich sont aussi des passionnés de l'histoire napoléonienne, si vous êtes à Breda rendez vous à Ginneken, un faubourg au sud-est de la ville vous pourrez alors y voir la tombe d'un Baron de l'Empire. David-Henri Chassé (descendant certainement d'une famille française protestante) était Colonel du 2e léger hollandais en 1803 et sert en Allemagne jusqu'en 1805. En 1806 il devient Général-major puis part en Espagne de 1808 à 1813, il est nommé entre temps Baron de l'Empire. En 1814, il combat pendant la bataille de France puis contre Napoléon après les 100 jours. Il repose dans le cimetière de l'église réformée de Ginnekenmarkt.
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