dimanche 16 février 2025

Le puissant Jagdpanther du Panzermuseum de Munster


Un jour d'été 2024, alors qu'il n'était pas encore 10 heures du matin, j'attendais patiemment l'ouverture de la grille d'entrée du Panzermuseum de Munster. L'attente n'était pas désagréable, il faisait beau, les Allemands parlaient entre eux sans se connaitre, la passion délie les langues, tous plus ou moins experts en quelques chose, du moins le pensaient-ils. Pour cette visite désirée depuis des années, j'avais décidé de me renseigner sur...rien. Je ne savais qu'une chose ou deux, le musée avait un Tiger Ausf B et un autre Tiger en "plastique". Alors une fois à l'intérieur, je suis allé de surprise en surprise, et je suis tombé sur un Jagdpanther, le blindé préféré de notre collaborateur Jean-Luc, pour preuve un modèle Forces of valor trône d'ailleurs sur son bureau...
 

Le Panzermuseum de Munster

Entrée du Panzermuseum de Munster

Le Panzermuseum est situé à Munster, une petite ville allemande sans intérêt, une ville garnison avec ses militaires, sa  (belle) boutique ASMC, son énorme terrain de manoeuvre à proximité où sont/étaient entrainés des Ukrainiens pas vraiment volontaires (des malgré-nous modernes). Dire qu'il n'y a rien à faire dans la ville, hormis la visite du musée, est donc un euphémisme.

Comparer le musée de Munster à celui de Saumur serait une erreur. Le musée des blindés est plus riche, plus grand et aussi plus internationale. La force de Munster ce sont ses blindés de l'armée allemande, de la seconde guerre mondiale à la RFA et RDA jusqu'au Leopard 2, oui oui le même qui est actuellement très apprécié des Lancets et autres Kornets/Fagots russes.

Le fleuron des chars allemands le Leopard 2 est la star du Panzermuseum... mais quelques épaves sont aussi exposées au Patriot Park en Russie sans parler du modèle en évaluation au centre Uralvagonzavod

La visite est agréable, il n'y a pas ces maudites cordes que l'on voit à Saumur, nous pouvons donc tourner autour des blindés. Durant la visite, vous pouvez aussi croiser le responsable du musée, Ralf Raths, lui poser des questions et c'est vraiment sympa.
Un autre point qui m'a particulièrement marqué est l'affluence. Le nombre de visiteurs me semble bien plus important que celui de Saumur et pourtant je n'y étais pas un week-end. C'est simple, il était difficile de prendre des photos sans avoir une personne dans le cadre de l'objectif.
Je terminerais par le point négatif : la boutique. Celle-ci ne représente quasiment aucun intérêt, le choix des livres est franchement limité, peu de maquettes hormis celle de la marque Lego (!) c'est dommage car il y a de quoi faire.
 
Le chouette ticket d'entrée du Panzermuseum qui deviendra un marque page
 

La génèse du Jagdpanther

 
Suivant les recommandations du Waffen Amt du 3 août 1942, le 20 septembre 1942, Adolf Hitler donne l'ordre à Albert Speer de concevoir un chasseur de char. Le cahier des charges est simple, le blindé doit reposer sur la base du châssis Man VK 30.02  Pz.Kpfw V "Panther" mais avec un canon plus puissant, le 88 mm contre le 75. Comme c'est un Panzerjäger (un chasseur de char) il devra être dénué de tourelle pivotante et donc être plus économique à la fabrication.
En Octobre 1942, Speer confie le développement et la future construction du blindé à Daimler-Benz, qui produit aussi le Panther. Krupp A.K est aussi partenaire du projet.


Une production chaotique

 
Le premier prototype V101 voit le jour en octobre 1943, un second V102 en novembre enfin les 5 modèles de pré-séries sont présentés en janvier 1944 aux inspecteurs du Waffen Amt qui valident les exemplaires.
Les plaques de blindage pour la caisse sont construites à l'usine Brandenburg Eisenwerk Kirchmöser, le canon de 88 Pak 43/3 L/71 est fabriqué par Dortmunder Hoerder Hüttenverein à Lippstadt et l'assemblage démarre chez MIAG (Mühlenbau und Industrie AG) à Braunschweig en janvier 1944. Mais l'usine fait l'objet de bombardements répétés de février à octobre 1944 et la cadence des sorties chute drastiquement, seulement 21 exemplaires assemblés au mois de septembre 1944. L'usine y construira un total de 272 exemplaires. 
 
Le premier prototype du Jagpanther, le V 101 en octobre 1943. On note les deux fentes de vision du conducteur (Fahrer)

Devant ce problème, les usines MNH (Maschinenfabrik Niedersachsen Hannover) et MBA se lancent aussi dans la production des Sd.Kfz. 173 Jagdpanther. Les premiers exemplaires sortent de MNH en novembre-décembre 1944, l'usine en assemblera 112 exemplaires. MBA (Maschinenbau und Bahnbedarf) à Postdam en produira 37 à partir de décembre 1944.
 
L'usine MNH après la guerre. Un Jagdpanther côtoie les tourelles de Panther ausf G, au premier plan les manteaux de canons boulonnés des Jagpanther 

La production cesse définitivement en avril 1945, d'autres sources indiquent mai 1945, les trois usines sont dorénavant aux mains de l'ennemi.
Le chiffre de production total est enveloppé de brouillard, suivant divers auteurs il est de 384 et monte jusqu'à 430 exemplaires incluant les prototypes et plusieurs Jagdpanther (12 ?) assemblés après la guerre par le British 823 Armor Troops Workshop REME No.13.   
 

Le Jagdpanther en bref

 
Le chasseur de char pèse 44 tonnes et est propulsé par un moteur Maybach HL 230 P30, un V12 à refroidissement liquide de  600 chevaux  à 700 chevaux. Sa boite est à 7 vitesses + 1 marche arrière.
Il peut rouler à 55 km/h sur route et 25 km/h en tout terrain (suivant le terrain !). Avec son réservoir de 700 litres, il a une autonomie de 160 km à 80 km en TT, là encore si ce n'est pas de la boue ukrainienne, ni le terrain sableux de la Pologne.  
5 hommes composent l'équipage, initialement ils devaient être 6.
Son armement est composé d'un canon de 88 Pak 43/3 L/71 fabriqué par Dortmunder Hoerder Hüttenverein à Lippstadt, il s'agit du canon du Tiger Ausf B. Le Jagdpanther emporte 57 obus antichar et explosif. Il y a aussi une MG 34 sur le glacis avant et 2 MP à l'intérieur pour le personnel.
Le Jagdpanther ne cessera pas d'évoluer quasiment de mois en mois. Par exemple, dès février 1944 la deuxième fente pour le fahrer est condamnée, une pièce de métal y est soudée. A partir du 9 septembre 1944, il est décidé de mettre fin à l'application du Zimmerit. En octobre, un manteau de canon avec huit boulons fait son apparition et des caches flammes sont installés sur les échappements etc.. Et puis il ne faut pas oublier que les Abteilung apporteront aussi leurs propres modifications tirées de leurs expériences sur le terrain.
Toujours au niveau des évolutions, initialement construit sur le châssis du Panther Ausf A, il sera ensuite assemblé sur celui du Panther Ausf G.
 
Jagdpanther de la s.Panzer-Abteilung 654 traversant Bourgtheroulde en août 1944. Nous sommes au niveau du n° 197 Grande rue, l'hôtel-restaurant a été rasé depuis, tout comme la ruine à l'angle. La maison au fond à droite est toujours en place. Le Jagdpanther a un canon en deux parties et la deuxième fente de vision est condamnée.
 

Une utilisation limitée ?

 
Le 14 juin 1944, dans la fiche 75a/20 de l'inspecteur général des troupes blindées il est mentionné que « l'absence de tir circulaire, les possibilités limitées de défense rapprochée et la visibilité restreinte » interdisaient son utilisation comme char et exhortait à sa sécurisation par l'infanterie et des blindés, Panther. Le pointage en site du canon est limité, 11° à gauche comme à droite, en dehors de ces limites c'est au fährer de faire pivoter le blindé sur ses chenilles. En dehors de ce problème inhérent au concept même de chasseur de char, son canon s'avère redoutable car il capable de détruire n'importe quel char a 2500 mètres. Les experts sont unanimes, disposant de la puissance de feu d'un Tiger Ausf B, d'un blindage frontal épais et de l'agilité d'un Panther, pour un coût "modique", le Jagdpanther était le meilleur chasseur de char de son temps mais malheureusement il y en eu trop peu.  

 
Le Jagdpanther Ausf G1 exposé à Saumur est un modèle basé sur un châssis de Panther Ausf A. Avec son manteau de canon soudé à la caisse et son canon d'une pièce, il diffère visuellement du modèle de Munster
 
 
Le canon de l'exemplaire de Munster est en deux parties. Son manteau de canon est boulonné plutôt que soudé, et son châssis repose sur celui d'un Panther Ausf G.

 

Le Jagdpanther Ausf G2 de Munster

 
Le Jagdpanther de Munster a été fabriqué par MNH (Maschinenfabrik Niedersachsen Hannover) en mars 1945, son numéro de châssis est le 303094. Capturé en Allemagne par les Britanniques en avril 1945. Malheureusement, son passé guerrier, son unité, sont inconnus et c'est bien dommage. En 1961, les Britannique cède gracieusement le Jagdpanther à la Bundeswehr qu l'expose à l'air libre dans une caserne. 
 
1961. Réception du Jagdpanther par la Bundeswehr.  
 
Lorsqu'il a été décidé de lui offrir une retraite bien méritée dans un musée, le Jagdpanther était en sale état. Sa coque était déformée et fortement rouillée, le moteur était au abonné absent et son système de suspension complètement endommagé. La restauration s'annonçait donc longue et onéreuse, surtout si le blindé devait être remis dans son état d'origine, ce qui ne fut pas le cas...comme le Panther Ausf A du même musée. 
 
Le Jagdpanther exposé dans une caserne de la Bundeswehr avant d'entamer sa restauration.
 
Les barres de torsion, à l'origine détruites, tirent maintenant leurs origines d'un Leopard 1. Le faisceau électrique, le moteur comme la boite de vitesse proviennent d'un Spähpanzer et puis naturellement le système de refroidissement n'est lui aussi plus d'origine. Quelques pièces de transmissions, notamment celles qui vont du moteur aux barbotins ont été récupérées en France.
 
Le Jagdpanther présente bien et reste plus beau qu'un pachydermique Jagdtiger

 
La trappe de vision du fährer est différente du modèle G1, exit la petite gouttière

La caisse du Jagdpanther est lisse, pas de zimmerit ce qui est normal vu le mois et l'année de production

 
Le Jagdpanther ne dispose d'aucune numérotation ni d'emblème de division, c'est dommage

 
Le blindé à ses schürzen contrairement à celui de Saumur 

 
Regarder bien, un énigmatique "754"  est inscrit dans le métal du périscope du chargeur.

 
Les impacts 



Belle vue sur le Kugelblende et le canon de la MG 34. Le Jadpanther exhibe ses cicatrices

Le manteau du canon a reçu plusieurs impact dont un qui l'a transpercé

un fort impact, à droite, a été colmaté maladroitement lors de la restauration

La puissance de l'impact à gauche a déformé la caisse, les soudures ont cédé. Lors du choc, du métal à du être projeté à l'intérieur
 
Les chenilles
 
Les chenilles étaient fabriquées par Moorburger Trackenwerke à Hamburg-Moorburg. Les chenilles étaient constituées de 84 ou 86 maillons, suivant la taille du barbotin avant, là encore une évolution au cours de sa carrière. La chenille à 84 maillons pèse tout de même 2050 kg ! 
 
Barbotin avant avec galets et caoutchouc du Jagdpanther

 
Selon le barbotin avant la chenille pouvait peser 2050 kg voir plus !


 
Le compartiment arrière
 
 
Le moteur n'est plus d'origine et son refroidissement non plus, du coup les ventilateurs reprennent le design des premières versions de Jagdpanther


 
L'intérieur était peint en blanc ou en beige clair

Le Jagdpanther 231 Forces of Valor

 
J'en avais parlé au début de l'article, voici  le Forces of  Valor Jagdpanther Ausf G1 Normandie août 1944 de Jean Luc.
 
Forces of Valor Jagdpanther Ausf G1 Normandie août 1944
    
Forces of Valor Jagdpanther Ausf G1 Normandie août 1944


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