dimanche 23 mars 2025

Le Leutnant Helmut Ufer et ses trois Spitfires


 
Durant les vacances de l'été 2024, je me suis rendu dans la Somme, dans la baie mais aussi dans les terres. Avant de voir le champ de bataille d'Azincourt, j'ai fait un crochet au cimetière militaire allemand de Bourdon, un cimetière que je n'avais pas visité depuis plusieurs années. Cette fois-ci, contrairement à la première fois, la météo était de mon côté, j'ai déambulé dans le bloc 32 et je me suis attardé devant la tombe d'un pilote de chasse de la Jagdgeschwader 26 "Schlageter"

Helmut Ufer rejoint la "Schlageter"

 
Helmut Ufer est né le 28 août 1914 à Altenessen, un village qui est devenu au fil du temps un quartier d'Essen.
Venant de l'Arme blindée, en 1940, il demande à s'engager dans la Luftwaffe pour devenir pilote de chasse. Sa candidature est acceptée et il intègre ainsi une Jadgfliegerschule, Ufer prend alors les commandes d'un Messerschmitt Bf 109.

Helmut Ufer

A la sortie de son école de chasse, il est versé à la Erg./JG 26, la fameuse et prestigieuse "Schlageter". Chaque Jagdgeschwader dispose d'une Staffel de formation complémentaire pour les pilotes fraichement sortis des Jadgfliegerschulen. Pour la JG 26, la Ergänzungsgruppe (Erg./JG 26) est située en France et devant le nombre de pilotes de plus en plus élevé, la Staffel prend même la taille d'un Gruppe. La Erg./JG 26 déménage souvent mais se trouve tout de même à l'écart de la Jadgeschwader c'est pourquoi on a pu la voir à Arques puis Cognac, Dieppe...

Contre l'Angleterre

Après ses "classes" à l' Erg./JG 26, il est versé à la 4.Staffel du II./JG 26 en juillet 1941 et on lui donne les commandes d'un Bf 109F-4, il n'aura aucune victoire avec cet avion. Les Focke Wulf remplacent progressivement les bons vieux Messerschmitt et Ufer prend possession d'un Fw 190A-1 "Weiß 5 +" c'est à dire qu'un "5+" est inscrit en blanc sur les flancs de la carlingue de son avion. Son Fw  a le numéro de série 10036, soit le 36e A-1 sorti des lignes de production, sur les seulement 102 exemplaires totaux. 

Qu'est ce qu'un Focke Wulf Fw 190A-1 ?

 
Le Fw 190A-1 est une évolution du Focke Wulf 190. Les premiers A-1 voient le jour en juin 1941 et la production s'arrête en novembre de la même année pour laisser sa place à la version A-2.
Par rapport à son prédécesseur son armement est renforcé, ses canons d'ailes sont des MG FF 20 mm contre 17 mm auparavant. Le système de refroidissement est largement modifié, y compris au niveau des échappements car c'était là véritablement et dramatiquement le point noir de l'avion. La canopée du pilote est dorénavant éjectable grâce à un système de mise à feu, c'est un énorme avantage lorsqu'il faut sauter en parachute.
 
Des Focke Wulf Fw 190 de la JG 26 "Schlageter" s'apprêtent à décoller. Avec son allure racée, l'appareil donne un coup de vieux au Messerschmitt Bf 109

Autant l'écrire tout de suite, il n'existe plus aucun Fw 190A-1 dans le monde (ou peut être dans un marais du côté de la Russie ?) malgré tout si vous allez en Norvège, vous trouverez au Herdla Museum, un Fw 190A-2 "Jaune 16". il s'agissait de l'avion de l'Uffz Wolfgang Kind de la 12./JG 5 qui s'était écrasé en mer le 13 décembre 1943.  Pour ce qui est de la France, rendez vous au musée de l'air et de l'espace au Bourget au hall de la seconde guerre mondiale, vous y trouverez un NC 900 qui est ni plus ni moins la dénomination française d'un Focke Wulf Fw 190A-8.
 

Première victoire !

 
Le vendredi 13 mars 1942, les Britanniques lancent Circus n° 114, huit bombardiers Douglas Boston ont pour mission de bombarder les installations ferroviaires de Hazebrouck, ils sont protégés par des Spitfire des Squadron 303, 124, 401 et 602 qui ont aussi la charge de détourner les chasseurs allemands notamment le JG 26 "Schlageter" dont le II./JG 26 basé au Fliegerhorst d'Abbeville-Drucat dans la Somme.
A 16h15, dans le secteur de Wiere Effroy (nord-est de Boulogne sur Mer), l'Oberfeldwebel Ufer abat un Spitfire Mk.Vb du No 124 Squadron. Le pilote, guère chanceux, était le P/O Michael Gordon Meston Reid. Blessé, il est capturé par les Allemands mais malgré les soins prodigués dans un hôpital, il décède de ses blessures le 7 août 1942, il n'avait que 20 ans et appartenait à la Royal Air Force Volunteer Reserve. Il est inhumé dans le cimetière de Hardinghen dans le Pas de Calais, tombe 5.
 
Moment de détente entre deux missions pour le Hauptmann Joachim Müncheberg qui s'amuse avec la mascotte.  L'As ne survivra pas à la guerre, il est inhumé en Tunisie à Borj Cédria. 
 
Ce n'est pas la seule victime connue de la JG 26, un autre Spitfire du 124 Squadron est descendu au dessus de Offrethun, piloté par un Tchèque, sa tombe peut être vu ici. A-t-il été descendu par le célèbre Hauptmann Müncheberg de la Stab II./JG 26 qui revendique aussi une victoire à 16h17 au dessus de Wiere Effroy ? il y a de forte chance.
 

Abschuss !

 
Le samedi 4 avril,  c'est Circus N° 119, douze bombardiers Douglas Boston du 88 Squadron et leurs escortes de Spitfire volent en direction de la gare de Saint Omer. Les avions ennemis sont repérés sur le tard  et malgré la Flak allemande la mission est accomplie mais le chemin du retour va être nettement plus compliqué, la JG 26 est dans les airs et il n'y a aucun nuage dans le ciel. Le groupe ennemi prend la direction de Saint Omer où les bombardiers sont attaqués par le I./JG 26, des Spitfire sont descendus mais si deux bombardiers sont touchés, ils arrivent néanmoins à rallier en Angleterre sur un seul moteur.
A 11h43, l'Oberfeldwebel Ufer est au sud-est de Calais lorsqu'il a un Spitfire dans son viseur, les canons crachent leurs feux, Abschuss ! C'est une deuxième victoire pour l'Oberfeldwebel.
 
P/O Thomas Fox du 485 Squadron RNZAF
 
L'identité de sa victime n'est pas connue mais après quelques recherches nous savons que le P/O Thomas Fox,  un Néo-Zélandais, pilotait un Spitfire Mk.Vb du 485 Squadron RNZAF. Ce jour là, son groupe est pris à partie par une trentaine de Focke Wulf de la JG 26. L'avion de Fox est touché, une fumée blanche s'échappe de son moteur qui va bientôt être en surchauffe, l'avion oblique vers le sol, c'est la fin. Le Spitfire s'écrase à Louches, un village au sud-est de Calais, sud-est de Calais comme la victoire attribuée à Ufer ? la réponse est oui.
Le corps du malheureux est inhumé par les Allemands au cimetière des Bruyères à Longuenesse mais chose incompréhensible, du moins pour un allié, son corps a disparu depuis. 
 

Un autre Spitfire au tapis

 
Le jeudi 30 avril 1942 en début de soirée, C'est Circus 148. Des Boston attaquent les installations ferroviaires d'Abbeville, la ville avait déjà subie un bombardement britannique cinq jours auparavant tuant 16 civils et faisant de nombreux blessés. 
 
Un Supermarine Spitfire touché par la chasse allemande

Les trois groupes de la JG 26 font vrombir leurs moteurs et partent au contact qui a lieu au dessus de la baie de Somme. Les Focke Wulf abattent 8 Spitfire en 12 minutes. Il est 19h37, lorsque l'Obfw. Ufer  descend un Spitfire Mk.Vb du 222 Squadron au dessus de Sainte Valéry. Le Warrant Officer Leslie Gordon Rowe qui avait décollé de l'aérodrome North Weald ne s'éjecte pas mais parvient à poser son avion sur le ventre avant d'être capturé. Interrogé, il part ensuite au Stalag 357 Kopernikus à Torun dans l'actuelle Pologne. Il décède en captivité à Kiel le 29 avril 1945, et est inhumé au Kiel War Cemetery, parmi d'autres pilotes de la RAF. Son avion sera récupéré puis démantelé avant d'être fondu en lingot de métal, l'art du recyclage.  

Seul contre tous

Le dimanche 13 juillet 1942, douze Boston bombardent les infrastructures ferroviaires de Boulogne. Comme d'habitude, les bombardiers sont protégés par les Wings Tangmere, Hill et Kenley. L'Oberfeldwebel Ufer monte dans son Fw 190, le mécanicien démarre le moteur à l'aide d'une manivelle. L'avion s'envole une dernière fois vers sa destinée, Ufer va mourir. Le No. 616 Squadron (Northamptonshire) est dans le secteur d'Abbeville, le Lieutenant australien Frederick Anthony Owen Gaze, dit Tony Gaze, pilote un Supermarine Spitfire, il raconte :

"Après une orbite à droite autour d'Abbeville à 21 000 pieds, j'ai vu un seul Fw-190 monter à environ 16 000 pieds entre nous et la côte. Je me suis assuré qu'il n'y avait rien au-dessus de nous et j'ai dirigé la Section Rouge vers le bas pour attaquer. J'ai tiré une rafale d'une seconde à environ 300 mètres de l'arrière en voyant des coups de canon sur le plan principal bâbord près du cockpit. Lorsque j'ai recommencé à tirer, le 190 a basculé sur la gauche en émettant une bouffée de fumée noire et blanche, puis il est tombé en vrille."

Le Flight Lieutenant Tony Gaze à bord de son Spitfire 

Nibas petit village situé à 17 kilomètres à l'ouest d'Abbeville. Comme tous les dimanches matin, les habitants se rendent à la messe. Alertés par un hurlement déchirant le ciel, plusieurs villageois aperçoivent un avion en train de plonger, presque à la verticale, dans leur direction. Dans une énorme explosion suivie d'une boule de feu, l'appareil s'est écrasé dans un champ à environ 300 mètres de l'église. Dans le ciel malheureusement il n'y a aucun parachute. Les habitants s'empressent d'arriver sur les lieux du crash mais ils n'y trouvent qu'un cratère fumant, du métal broyé, fondu et ce qui ressemble à un corps calciné, celui d'Helmut Ufer. Malgré que la victime soit allemande, l'émotion des habitants est palpable.

Une équipe d'Allemands est dépêchée sur les lieux pour récupérer la dépouille de l'Oberfeldwebel, une sale besogne néanmoins nécessaire. Le pilote aux trois victoires est inhumé dans le carré allemand du cimetière d'Abbeville. Il est élevé au grade de Leutnant à titre posthume.

Après la guerre, au début des années 60, sa dépouille est transférée et inhumée au cimetière militaire allemand du petit village de Bourdon.   

Vue aérienne de Nibas en 1947 soit cinq ans après le crash du Fw 190. Helmut Ufer s'est écrasé dans l'un des champs que nous voyons derrière l'église
  

La tombe du Leutnant Helmut Ufer 

Comme beaucoup de pilotes de la "Schlageter", le Leutnant Ufer repose au Deutscher Soldaten Friedhof de Bourdon dans le département de la Somme. Il partage sa croix avec deux autres pilotes de la même Staffel que lui, l'Uffz Gerhard Birke et l'Uffz Heinrich Damm

Plan du Deutscher Soldatenfriedhof Bourdon où se trouve le carré 32

L'emplacement de sa sépulture se trouve au bloc 32 rangée 10 tombe 270

La tombe du Leutnant Helmut Ufer de la Jagdgeschwader 26
 
Les noms des trois pilotes de la Jagdgeschwader 26 gravés sur la croix

Le cimetière militaire allemand de Bourdon

 

Le cimetière militaire allemand de Bourdon
 
En 1961, le Volksbund a commencé à regrouper à Bourdon les sépultures des soldats qui étaient enterrés dans les cimetières des villes et villages du Nord, du Pas-de-Calais et de la Somme.
Le cimetière a été inauguré officiellement le 16 septembre 1967, la section de Rhénanie du Nord-Westphalie du Volksbund parraine le cimetière.  
 
Une très grande partie des 22 216 soldats allemands qui y reposent sont tombés lors de la campagne de France de mai-juin 1940, dont de nombreux Waffen de la "Totenkopf". Il faut dire qu'avec la création de la poche de Dunkerque, la région Nord a connu d'effroyables combats.
Une autre partie concerne des soldats tués fin août-début septembre 1944, notamment après la traversée de la Seine.

Enfin, il y a une part non négligeable de pilotes de la Luftwaffe notamment ceux des Jagdgeschwader, les unités de chasse. Les tombes de ces pilotes s'étalent sur quatre années de guerre dans le secteur. Il y a de nombreux articles à leurs sujets sur le blog.

Le cimetière militaire allemand de Bourdon

Le Fliegerhorst Abbeville-Drucat

 
Fw 190 de la JG 26 au bord d'une taxiway à Abbeville-Drucat

Dès 1941, dans le but d'accueillir les I. II. et III./JG 26, les Allemands décident de moderniser les infrastructure d'Abbeville-Drucat qui n'était auparavant qu'un modeste aérodrome. Trois importantes pistes en béton sont donc construites en 1941-1942. Celle la plus à l'ouest faisait 1650 mètres, celle transversale faisait 1600 mètres et la dernière, au sud, mesurait 1465 mètres. Les trois pistes faisaient 50 mètres de large. Elles étaient connectées aux multiples taxiways, les voies de garages pour avions, ainsi qu'aux voies de services.
Pour faciliter l'approche par mauvais temps, les avions étaient guidés par un faisceau Lorenz ainsi que par des feux de piste.
La forêt au sud de Plessiel était largement utilisée pour les besoins de la maintenance, armements des avions etc pour l'occasion il y avait des splitterschutzbox
 
Fliergerhorst Abbeville-Drucat
Aérodrome d'Abbeville-Drucat avec les infrastructures encore en place. au nord le village Le Plessiel, à l'est, Drucat.
 
Fliergerhorst Abbeville-Drucat
Les trois pistes de Drucat utilisées par la Jagdgeschwader 26
 
Le 19 août 1942 à 11h30, 22 bombardiers B17 du 97th Bombardment Group du VIII Bomber Command 2 larguent 34 tonnes de bombes sur le Fliegerhorst. La mission est de faire diversion et d'occuper la chasse allemande puisque le jour même a lieu le débarquement de Dieppe.
Deux Fw 190 sont endommagés au sol. Le bombardement n'atteint pas l'objectif escompté, les pistes ne sont pas détruites puisque 7 minutes après le bombardement des chasseurs décollent....
 
Bombardement de l'aérodrome d'Abbeville-Drucat

 
Quelques vestiges (il faut aimer le béton)
 
A l'été 2024, contre l'avis de ma femme et de ma fille, nous avons tout de même eu l'occasion de dormir sur l'ancien aérodrome de la JG 26, et surtout sur une des pistes d'envol .
Aujourd'hui encore, il existe quelques vestiges de la base aérienne d'Abbeville-Drucat (la preuve !) aussi appelée "le Plessiel" du nom du village au nord de la base.
Sur le sujet des aérodromes je vous conseille le livre : "La Jagdgeschwader 26, histoire de quelques aérodromes de la Luftwaffe dans le nord de la France de Nicolas Grebert"
 
Dormir sur la piste d'envol des Fw 190 de la JG 26, c'est le top pour certains et carrément n'importe quoi pour d'autres. Là le camping car est sur la piste transversale
 
Les deux pistes "allemandes" bétonnées se croisent avec la piste moderne

La piste transversale croisant la D928

A gauche la taxiway sur la D 928. Dans le champs à droite nous remarquons une position de Flak avec sa tranchée pare-éclats.
 
Ce qu'il reste de la taxiway sur la D928

Taxiway aujourd'hui situé au 55 route nationale à Le Plessiel

La maison repose sur des bonnes fondations

Secteur Le huy - rue du château à Le Plessiel. Au carrefour nous remarquons une position de Flak avec sa tranchée par-éclats. Nous remarquons aussi les fondations d'un hangar (?) à proximité du carrefour.

Emplacement du hangar (?) rue du château d'eau. Le relief démontre que les soubassements sont encore là.

Un peu plus loin un emplacement bétonné toujours situé sur la rue du château d'eau

Le Plessiel près de la rue de la gare secteur le Huy

La première dalle est encore présente, pour les suivantes il ne reste que les fondations des bâtiments.

Les bâtiments étaient sans doute des splitterschutzbox. Un soubassement en dur surmonté d'une toile, d'un filet de camouflage sorte de "toile de tente" semi-rigide.
 
Petit souvenir, un morceau de béton de la piste transversale. Les Fw 190 ont posé leurs roues dessus il y a 80 ans déjà.

 

Liens

 


vendredi 14 mars 2025

Un bombardier He 111 espagnol exposé à Munich


Un petit détour vers Munich où je me rends vers un ancien aérodrome qui est devenu un musée de l'aviation. Dans cet article,  je vais me pencher sur un bombardier allemand que j'apprécie pour la fluidité de sa ligne, le Heinkel He 111 seconde version, c'est à dire avec sa verrière bien caractéristique. Cet avion avec le Me Bf 109 est un symbole de la bataille d'Angleterre, même si il a opéré sur tout les fronts, du Caucase à la Libye, de la Norvège à l'Italie. 

Le ticket d'entrée est carrément minable

J'ai garé le camping-car sur un parking gratuit et plutôt tranquille à proximité immédiate d'un vaste château, le musée ne se trouve qu'à quelques centaines de mètres à pieds. En cette fin de matinée, le temps est beau et déjà chaud, la balade  entre les arbres qui bordent l'allée est franchement agréable, bref ce sont des conditions idéales pour une belle visite d'autant plus que l'affluence dans le musée est modérée.  

Le bombardier He 111

A l'origine, le Heinkel devait être une avion de ligne destiné à la Deutsche Luft Hansa. Sur le papier il devait transporter 10 personnes rapidement et confortablement mais en même temps le RLM (Reichsluftfahrtministerium) est à la recherche d'un bombardier. Les bureaux de Berlin adressent alors un cahier des charges aux constructeurs Heinkel et Junkers avec ces conditions : l'avion doit avoir une autonomie de 1000 km et emporter 1000 kg de bombes.

Un He 111 vole en direction de l'Angleterre

Le premier prototype du He 111A est un bombardier et vole le 17 novembre 1934, il surpasse en de nombreux points le prototype de Junkers, le Ju 86. La version civile du Heinkel est testée l'année suivante mais du fait du compartiment exigu le confort des passagers n'est finalement pas vraiment au rendez-vous.

Les premiers modèles sont équipés de deux moteurs Daimler Benz 600 CG puis  600 Ga mais Daimler Benz ne peut pas produire suffisamment de moteurs, Heinkel se tourne alors vers le  Junkers Jumo 210 Ga puis finalement le Jumo 211 A-1 de 1075 chevaux.

1937, la guerre en Espagne 

La guerre civile espagnole éclate en 1936 avec son lot de barbarie d'un autre âge. Les avions de l'armée de l'air espagnol tout comme les usines sont majoritairement aux mains des républicains et communistes qui reçoivent l'aide de Staline avec la livraison de différents types d'avions soviétiques mais tout ceci n'est naturellement pas gratuit, l'international communisme se paye et les réserves d'or du pays prennent la direction de Moscou.

De leurs côtés à travers la Legion Condor et l'Aviazione Legionara, l'Allemagne et l'Italie soutiennent les troupes du général Franco. C'est ainsi qu'en février 1937, les  quatre premiers He 111B se posent en Espagne, près d'une centaine d'autres suivront, des modèles B, B-2 et E-1. La première mission d'un He 111 A lieu le 9 mars de la même année.  

Un Heinkel He 111 B dans sa première version et sa face avant plutôt banale

A l'issue de cette guerre, 38 He 111 E de la K/88 et 21 autres He 111 sont cédés à l'Ejercito del Aire (l'armée de l'air espagnole) qui formeront deux groupes de bombardements. Quelques He 111 B sont aussi laissés sur place. 

Un Heinkel He 111 pris en photo depuis le poste de mitrailleur d'un autre He 111

Après la guerre en Espagne, qui a servi de terrain d'essai pour la Luftwaffe, le Heinkel est largement modifié. Comme les pilotes se plaignaient de la mauvaise visibilité le constructeur modifie considérablement l'avant de l'appareil en concevant la mythique verrière. L'esthétique et l'aérodynamisme de l'avion se trouve ainsi considérablement changé.

Durant sa carrière, qui dura toute la guerre et même après, le He 111 connaitra naturellement de nombreuses versions et de multiples évolutions de ces versions. Pour de plus amples informations sur l'histoire du He 111 je vous invite à lire et à acheter le Hors Serie Aérojournal n°28 aux éditions Caraktère

Préparation de l'avion au combat 

Remplissage des réservoirs d'essence

L'effort est certain mais que l'on se rassure, la plus grosse sera installée sur une sorte de traineau et trainée par un petit véhicule

Les bombes sont installées dans la soute à la verticale

Les plus grosses sont installées à l'extérieur en position ventrale, sur cette photo nous voyons le mécanisme de fixation

L'équipage

Briefing avant le départ en mission vers l'Angleterre

Pour cette mission l'équipage du He 111 est composé de 4 personnes
 
Un des membres d'équipage, parachute à la main pénètre dans l'avion. Notez la souplesse de la jeunesse

Le mitrailleur à l'avant prépare son poste de combat. Il va vérifier le bon fonctionnement de son tourillon et armer sa MG 15 de 7,92 mm

Le démarrage des moteurs se fait à la force des bras avec une bonne vieille manivelle, lancer les gros pistons ne doit pas être une mince affaire

Le mitrailleur ventral a aussi une bonne vue sur le largage des bombes

Nach England ! nous retrouvons notre mitrailleur entre le pilote et le co-pilote

Très belle photo d'un pilote en altitude, le masque et ses gants trahissent une température pas très chaude


C'était l'avion de Léon !

Le He 111 le plus célèbre reste sans contexte l'avion du SS-Standartenführer Léon Degrelle qui décolla depuis la Norvège pour ammerir en panne d'essence sur la plage de la Concha à San Sebastian en Espagne, le 8 mai 1945. Pour plus d'informations sur ce sujet, vous pouvez lire le numéro 285 du magazine 39-45

Le He 111 H-22 TQ+MU de Léon Degrelle était l'avion personnel de l'architecte Albert Speer

Les He 111 espagnols

Après la guerre civile, l'armée de l'air espagnol général Franco conserva quelques dizaines de He 111 allemands de la Légion Condor puis dès septembre 1941, les Espagnols eurent l'autorisation de fabriquer sous licence leurs propres He 111
La production prévue de 200 appareils fut très lente et l'Espagne du acheté un lot de moteur Jumo 211 F à la France, si bien que le premier modèle 100% ibérique ne vit le jour qu'en 1945 et ne prit son envol que le 23 mai 1945  ! L'avion prend le nom de Casa 2-111 A (111 pour rappeler le He 111) et 130 appareils sont équipés de Jumo. Il est décliné en trois versions : bombardement, entrainement et reconnaissance.

Durant la guerre, l'Espagne reçut trois He 111 J-1 destinés à la Escradilla de Sondeos Meterologicos. Les appareils sont utilisés pour les relevés météorologiques, ils étaient encore en service au début des années 50.

En 1951, il y a un cruel manque de pièces détachées et les moteurs Jumo sont changés par des Rolls Royce Merlin 500-29 britanniques sur 70 appareils.  L'avion prend alors la désignation de Casa 2-111 B

Au total, l'Espagne a produit 236 exemplaires et les derniers encore en service sont retirés en 1975, seuls 14 appareils ont survécu à la destruction. Pour information un Casa 2-111 était exposé au musée de l'Air du Bourget mais il n'y est plus.

musee de l'air bourget paris
Casa 211 aux couleurs espagnoles au musée de l'Air du Bourget

Le Casa 2.111 est un avion de 14 tonnes et d'une longueur de 22,60 mètres. Ses deux moteurs Rolls Royce Merlin 500-29 développaient 1600 chevaux chacun pour une vitesse maxi de 418 km/h à 4400 mètres d'altitude, son plafond maxi est de 7000 mètres. Avec une vitesse moyenne à 315 km/h son autonomie était de 2255 kilomètres, suivant son emport. 

Il pouvait embarqué 2 tonnes de bombes et son équipage était de 5 hommes, dont 3 mitrailleurs pou rla version bombardier. L'équipage allemand pouvait être de 4 hommes seulement.

Le Casa 2.111 B du musée 

Le Casa exposé au musée de Munich a été assemblé en 1950 à l'usine Construcciones Aeronauticas S.A (le nom complet de CASA) de Tablada. C'est un Casa 2.111 B basé sur le He 111 H-16, le 25e sorti d'usine. Sa codification était 64-15 et son numéro de série B2-1-77

Un présentoir devant l'avion montre une photo du casa lorsqu'il était encore en service

Il était opérationnel au sein de l'Armée de l'Air espagnol jusqu'en 1967 puis à l'instar des Buchon ou du Casa 2.111 du musée de Sinsheim, il entame un carrière d'acteur pour les besoins du film "La bataille d'Angleterre" et le film "Patton". Revendu en 1970, il quitte définitivement son pays natal pour se poser sur le tarmac de Munich en septembre de la même année.

Trois Heinkel/Casa du film "la bataille d'Angleterre", celui de Munich est dans le lot ?

De 2000 à 2009, il est en restauration et retrouve ses couleurs originales 64.15 du G.E.V. (Grupo de Experimentacion en Vuelo) qu'il arborait à Torejon de 1958 à 1961. 

Durant les années, le Casa a changé de place plusieurs fois  et maintenant il n'est pas possible de faire le tour de l'avion, des cordes vous y empêchent et de toute façon avec les avions autour, les photos n'auraient pas été supers.   

Le Casa est à l'entrée d'un hall, des moteurs allemands sont exposés devant l'appareil



Avec une verrière pareille on peut espérer que l'avion était équipé de la climatisation l'été

Le moteur Rolls Royce Merlin et son radiateur nécessite le montage d'un carénage totalement différent d'un Jumo

Le poste de mitrailleur, sans mitrailleuse cette fois   

Le moteur Jumo 211 F

Le bombardier He 111 était équipé de deux moteurs Jumo 211 F, un moteur produit à environ 68 000 exemplaires, toutes versions confondues, durant une période allant de 1938 à 1944. La production de masse a véritablement commencé en 1942 avec pas moins de cinq usines basées à Magdeburg, Leipzig, Koethen, Muldenstein et Stettin. Comme d'habitude le moteur n'a pas été uniquement monté sur le He 111 puisqu'il équipait aussi les Junkers Ju 87 (le fameux Stuka) et le Junkers Ju 88 et même les Messerschmitt Bf 109 tchèques, les Avia S-199 et CS-199.

En ce qui concerne la technique, le moteur 35 l de cylindrée, V12 injection à refroidissement liquide de 1350 chevaux (211 F-2) au décollage et 1060 chevaux à 5 300 mètres d'altitude. Chaque moteur pesait 720 kg.

Le moteur présenté ci-dessous à été fabriqué en 1941 par l'usine Junkers Flugzeug-und Motorwerke AG à Dessau.


 


Un moteur Jumo M211F  est exposé au musée de l'aviation de Praha-Kleby

La construction d'un He 111

Maintenant nous allons suivre l'assemblage en usine de l'avion, il faut savoir qu'il a été construit à 7000 exemplaires, toutes versions confondues.



Les vitres ont été posées, une jeune femme ébavure les joints
 
Après la pose on protège les vitres

L'avion change d'atelier tandis quelques hommes à droite s'attèlent au montage des sièges 

l'arrière de l'avion est en cours de finition
 
Mise en place du poste de pilotage

Pendant ce temps les moteurs sont en cours d'assemblage

montage des trains d'atterrissage

Les moteurs sont montés
 
Maintenant nous assistons au montages des ailes...

...dernier coup d'énorme clé

Les avions quasiment finis vont recevoir leurs hélices

Montage de l'hélice

 
les portes de l'usine s'ouvrent...

...Un He 111 flambant neuf sort

Après un vol test, les avions vont s'envoler vers leurs destinées souvent tragiques
 

Où voir un autre Heinkel He 111 ?

Vous pouvez lire l'article sur le Heinkel He 111 du musée technique de Sinsheim, en réalité c'est un autre Casa 2.111 mais nettement moins bien restauré,  en cliquant ici

Le Deutsches Museum Flugwerft Schleissheim

 

L'entrée du musée de Schleissheim, un ancien aérodrome

Ce musée de l'aviation situé dans la banlieue de Munich est un ancien aérodrome, comme beaucoup de musée concernant les avions d'ailleurs. Il faut savoir qu'il a été dépouillé d'une partie importante de ses avions de la Luftwaffe, par exemple le Me 262 et Bf 109 se trouvent désormais au Deutsches Museum München dans le centre-ville de Munich. Pour ce qui nous intéresse, il ne reste plus que quelques moteurs Jumo 211 F, Daimler DB 610, un réacteur incomplet de V2 et des planeurs, utilisés par les Hitlerjugend mais aussi beaucoup d'objets personnels, y compris des uniformes. Le musée réserve tout de même quelques belles surprise, comme par exemple ce magnifique Fokker D VII de la première guerre mondiale.

l'aérodrome au sommet de sa gloire mais aujourd'hui cette salle est restée identique, des avions dont le Fokker y sont exposés. 
 
La belle époque où les avions pouvaient décollé depuis un champ, ne demander pas la même chose à un A 400 M, ni même un rafale.

Le magnifique Fokker D VII

Enfin pour les amateurs d'Histoire, vous pouvez allez voir un important château qui n'est qu'à cinq minutes à pieds. Napoléon, allié de la Bavière, s'y était rendu après sa victoire d'Austerlitz.

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